Des os de corail, des yeux de perle
Avec Ikezawa, on dirait toujours qu’une voix séjourne parmi nous. Une voix qui ne semble pas d’ici, mais dont il est permis de capter la rumeur à la faveur de certains no man’s land propices aux dialogues avec l’invisible : les champs neigeux de “Voyage vers le nord”, ou ce repli du temps, juste après la vie, quand les os retiennent encore un peu de l’âme aimée qui se disperse ( “Des os de de corail, des yeux de perle” ). Ses nouvelles dans leurs dénouements scintillent, légères comme des surprises : guirlandes d’un Noël de fortune après le dernier voyage; sourire où disparaissent l’inquiétude, la tempête et le doute; un peu de bleu, enfin, première couleur après l’âpreté d’un étrange rite funéraire, en signe d’harmonie avec le monde. Comme un peintre, il sait placer la lumière, réserver les transparences. Il excelle à disposer une scène de neige, des rires de jeunes filles dans le soleil, un banc de poissons minuscules filant dans les profondeurs. Il sait aussi désigner un point invisible au centre de son tableau, et faire de l’impalpable un objet de légende.
(Editions Philippe Picquier 1997) : recueil de trois nouvelles, “Des os de corail, des yeux de perle” (1990), “Espérance”(1989) et “Voyage vers le nord”(1995).